Aro R. raconte son arrivée à l'Institut du MAI suite

Cette formation reste pour le moment unique en France, ce qui explique mes 2 ans d'attente. Oui les places sont chères "au MAI" il y a une longue liste d'attente qui n'arrête pas de s'allonger.
Le déménagement entre Sèvres et Chinon, une vrai partie de "Tétris" à la seul différence qu’elle se joue dans une "Renault Kangoo" aménagée pour faire rentrer un fauteuil électrique de 177 Kg ayant pour dimension, 110 cm de long et 67 cm de large. La voiture est grande. Oui c'est bien, tout rentre sans difficulté, quand le fauteuil n'y est pas !!!
Allez, Aro, on vide la voiture, ensuite tu rentres dedans et on essaie de tout faire rentrer !!! Quelques jours avant le périple nous avons profité d'un jour où l'ascenseur était en service pour descendre toutes mes affaires dans la voiture, la voiture au parking et moi je suivais la voiture au parking ... Bref un vrai casse tête !!! Ha !!  La liste de mes affaires j'allais oublier de vous la donner ; en deux mots : ma maison !!! Avec plus de détails :

• 1 télévision (écran plat)
• 1 imprimante scanner photocopieuse 
• 2 valises de vêtements 
• 1 valise de jeux complet de serviettes de bain
• Quelques livres 
• 1 couette 
• 2 housses de couettes pour un lit 1 place 
• 1 seau 
• 1 ballet
• 1 raclette (non c'est pas le plat avec du fromage que l'on fait en hiver)
• 2 casseroles
• 1 poile 
• 1 autocuiseur 
• 1 service de vaisselle pour 6 personnes avec ses couverts et verres
• 1 ordinateur (heureusement portable, je  crois qu'un fixe ça n'aurai pas était jouable) et son disque dure externe
• 1 plaque de Plexiglas en forme de "U"
• 1 caméscope 
• 1 peluche

Bon il faut ajouter la trousse de toilette bien sûr ... Et une semaine de petits déjeuners ...
Après quelques heures dans le parking nous avons réussi a tout faire rentrer le fauteuil et moi y compris !!!
Heureusement que pendant une nuit Papa avait dessiné le plans de l'arrière de la voiture et pris les dimensions des plus grosses boîtes... Un vrai casse tête je vous dis.

Qui dit déménagement dit voyage.
Un voyage de 300 km pour arriver à Chinon. Durant lesquels je n'ai pas vu grand chose car j'étais au milieu de mes affaires dans la voiture. Je vous rassure nous avons fait des pauses sur le trajet et j'ai quand même pû descendre.
Après 3h de route nous arrivons à L'Institut du MAI. Comme a chaque fois je ne peux rien manger merci le stress !
 
Je rencontre les aides soignantes (A.S) pour la première fois tout se passe bien. Le déjeuner terminé nous continuons l'installation dans mon studio 12bis. Quand je suis arrivé l'ergothérapeute m’a donné un boîtier bleu avec un écran tactile en m'expliquant qu'il s'agit d'un contrôle d'environnement, oui mon studio est domotisé. En résumé, ce boîtier est une télécommande universelle, seule différence avec celle que l'on trouve dans le commerce, elle a plus de possibilités car je contrôle non seulement la télévision, mais aussi les lumières, volets, fenêtres, ouverture de la porte, téléphone et ascenseur. La liberté : plus besoin de quelqu'un pour tout ça, je maîtrise !!! Quand Papa à vu ça, il a dit « je veux la même chose à la maison !!! » et là j'ai rigolé. Une vraie perle de technologie !!! Nous terminons l'installation dans l'après-midi ... Bon je vous passe la scène de l’au-revoir...

Finalement je ne suis pas si perdu que ça, je connais quelque "clients" comme on les appelle ici.
Je retrouve particulièrement "Kika" Malika de son prénom, une petite que j'ai connue à l'école primaire et avec qui je m'amusais beaucoup étant petit. Et là je peux vous dire que ces années m’ont remonté à la gorge, nous nous rappellons l'époque et notre complicité revient petit à petit ...

La première nuit à l'Institut était catastrophique, je n’ai pas fermé l'œil de la nuit. Mais c'était normal, se retrouver à 300 km de sa famille, dans une région où l'on connaît personne ce n’est pas très rassurant. Heureusement qu'il s’agit seulement de la première nuit. Durant les suivantes j'ai réussi à dormir.

A la suite du programme : visite de Chinon et signature de l'engagement du respect des trajets formé par l'ergothérapeute pour les différents lieux stratégiques de Chinon (la poste, le carrefour city...). Si tu fais un zoom sur Chinon tu verras qu'il n'y a pas grand chose à faire. Tu trouves des bars, des cafés. Des restaurants (cool quand tous tes amis sont à Paris). Tu as deux, trois boutiques et après le Château de Thibaut 1er. Comparé à Paris tout est petit. Petite boutique, petit magasin, la chose la plus grande que l'on peut trouver c'est le Leclerc dans la zone d'activité avec son Mac drive, oui on trouve un Macdo sur Chinon !!! Il est là depuis un an si j'ai bien compris.

Tiens, en parlant de café, l'autre jour (mi Août) je suis sorti avec un client et une A.S, on était partis de l'Institut il faisait beau pour aller dans le centre ville. On commence à arriver dans le centre ville et là une grosse averse, pas le choix il fallait se poser à la terrasse couverte la plus proche !!  La terrasse était pleine, les gens nous voyant sous la pluie se sont décalés pour nous faire de la place. Le pauvre Morgan (un client) s'est retrouvé a l'angle de la terrasse (vous voyez l'endroit où l'eau coule le plus) il est rentré à l'Institut trempé comme s’il venait de se prendre un seau d'eau sur la tête, il était mort de rire pendant tout le trajet du retour. Et Sylvie avait les pieds sous l'eau avec ses Tongs, en arrivant elle faisait "splatch splatch" !!! Et moi dans l'histoire comparé à eux, c'est comme si j'étais passé entre les gouttes, j'étais presque sec.

Je vous rassure de suite ce n’est pas tous les jours comme ça, une autre fois je suis allé chercher un pack d'eau au Carrefour city dans le centre ville, il me restait un trajet que je fais normalement en 5min et bien en 5min j'ai du me prendre une bouteille sur la tête il s'est mis à pleuvoir comme je ne sais pas quoi j'ai dû me changer en arrivant.
Depuis ces deux jours je garde ma cape de pluie dans mon sac.

Depuis que je suis arrivé à Chinon je ne fais que comparer la vie d'ici à celle de Paris. Il y a quand même du positif, par exemple, les campagnards ne courent jamais, ici les gens ne conduisent pas vite comme à Paris où il faut toujours courir après le temps. Du coup le stress se fait moins sentir, on prend le temps de faire les choses et son temps par la même occasion.

Au début de cette aventure j'ai entendu parler d'un forum des associations. Je me dis : « tiens, je vais aller voir se qu'il s'y passe, je vais peut-être trouver des choses à faire dans la ville » ; compte-rendu de l'enquête rien d'attirant pour ma part. Je ne trouve que des activités pour les personnes âgées ou pour les gens qui ont l'usage de leurs dix doigts. Je déclare donc à ma formatrice : « Chinon ville morte ». Nous continuons donc nos recherches sur Tours. Je voulais faire quelque chose dans la musique ou dans la vidéo, pour le côté vidéo, je dispose déjà de mon matériel personnel il faut seulement que je trouve avec mon ergothérapeute une nouvelle adaptation pour m'en servir, vu que la dernière n'est plus utilisable.

En attendant, Elisabeth (ma formatrice) m'a trouvé une école de musique accessible sur Tours. Elle réussit à avoir un entretien avec un professeur. Nous organisons donc une première sortie sur Tours. Je n'avais pas quitté l'institut sauf pour faire mes courses. J'avais pas vu de feu tricolores depuis un mois (il n'y a pas de feu tricolores dans la ville de Chinon) ils commencent à me manquer, les embouteillages dans la ville aussi, bref, toutes les choses qui animent la vie d'un Parisien. Le jour de l'entretien avec le professeur, je me ressens vivre, je retrouve les feux, les embouteillages, et le bon air des pots d'échappements des voitures. Elisabeth me regarde et me dis en riant « tu as encore plus le sourire quand tu retournes dans une grande ville ». Je lui réponds : « oui j'adore Tours » !!!

Mon activité se passe à "Tous en scènes", j'y vais une heure par semaine. Je découvre un logiciel que je n'aurais jamais connu ni dans la comptabilité ni dans le secrétariat. Un logiciel de M.A.O (Musique Assisté par Ordinateur). Dans quel objectif vous allez me dire : dans celui de pouvoir mettre sa propre bande son sur ses propres vidéos, hé oui je voudrais mettre en relation ma passion de la musique avec celle de la vidéo et de ce qui l'entoure (tournage, montage ...)
 
Après l'entretien j’étais satisfait des cours que je pourrais suivre plus tard (comment récupérer ces vidéos avec le logiciel, récupérer des chansons ou des parties de chanson, créer sa propre musique avec les instruments du logiciel ou ses propres boucles avec un clavier midi branché par câbles USB). Le premier cour était rapide car le professeur voulais me donner un aperçu le plus complet du logiciel "Ableton live". Le soir même je suis tombé sur un reportage sur les Difficultés à devenir DJ comme David Guetta et il montrait comment il créait ses sons et avec quel logiciel et il utilise aussi "Ableton" tout ça pour vous dire que ce n’est pas simple de se les procurer. Depuis quelque temps je vais donc une fois par semaine sur Tours le mercredi  et c'est trop bien.

Au retour de l'entretien avec le professeur je me suis endormis dans le TER heureusement que Chinon c’est le terminus, sinon je serais à Bordeaux ou je ne sais pas où. Une chose amusante dans la gare de Chinon et de Tours, les clients de l'Institut sont très connus, du coup on se fait tutoyer. C'est vrai que l'on fait souvent le voyage Tours - Chinon et que l'on ne passe pas inaperçu avec nos roulettes.

En rentrant à l'Institut je m'étais donné un premier objectif. J'avais promis à un couple d'amis que j'allais faire mon maximum pour assister à leur mariage. Je n’avais jamais pris le train seul, mais j'avais déjà fait le trajet avec ma mère. Je savais donc le déroulement. C'était un week-end de folie fort en émotions. Je me présente à la gare de Chinon (normal, je démarre de Chinon) monte dans le TER qui va à Tours, jusque-là, comme d'habitude. À Tours, je prends le TGV pour Paris. Le lendemain un ami des USA venu spécialement pour l'occasion vient me chercher à Sèvres avec sa compagne. Petit tour de la capitale pour prendre d'autres invités (nous sommes en voiture, pas en car), et nous prenions la route de Villers sur Mer en Normandie pour la cérémonie et le vin d'honneur. Ensuite des amis des parents de la mariée me raccompagnent sur Sèvres où je passe la nuit. Le lendemain j'ai repris le TGV pour Saint Pierre des Corps, une navette pour Tours et le TER pour Chinon. Quand je suis arrivé à Chinon j’étais K.O, j'ai eu besoin d'une semaine pour récupérer. Mais j’étais fière d'avoir pu tenir ma parole.
Dans la catégorie voyage SNCF, mon premier loupé : ça c'est passé le 5 janvier 2011, je commence bien 2011 moi !
Je devais prendre le train de 17h 25 à destination de Tours. A cause des embouteillages de Paris je suis arrivé 15 minutes avant que le train quitte la gare. A l'accueil ils m'ont dit : « Désole Monsieur vous arrivez avec 15 minutes de retard je crains que ce ne soit trop juste, ils appellent le service qui monte les personnes à mobilité réduite dans les trains... » : « Ah oui Monsieur c'est trop juste. Il faut que vous échangiez vos billets ». Je vais donc au guichet où l'on échange les billets qui se trouve à l'autre bout de la gare.

Pendant ce temps-là ma tante qui voulait faire une surprise nous cherche dans le train qui était encore sur les quais, vous vous dites il y a les portables dans ce cas, ben non elle l'avait oublié chez elle. Elle rentre donc chez elle. De notre côté nous retournons à l'accueil pour confirmer mes billets, puis nous rentrons à notre tour. De retour à la maison le téléphone sonne mon père décroche, à l'autre bout du fil ma tante : « Alors Aro est bien parti ? Je les ai vus dans le train mais pas lui ... » je lui réponds « non, je ne t'ai pas vue dans le train » et elle me demande : « Mais !!! Tu es où?». « À la maison » ... Cette fois-ci j'ai dû reporter mon départ au lendemain matin !!!

Lors de mon précédent voyage j'ai eu beaucoup de chance ! Je suis arrivé cinq minutes avant le départ de mon train. (Normalement une personne à mobilité réduite doit se présenter 30min avant le départ du train) Mais là il y avait une autre personne en fauteuil, j'ai donc pu profiter. Vous avez déjà entendu quelqu'un dire : « Ha que le monde est petit » ben moi je vous dis qu’il est vraiment petit. Je prenais le train qui allait jusqu'à Bordeaux. Quand je suis monté dedans j'ai retrouvé un ami que j'avais rencontré au lycée. Du coup le voyage entre Paris et Tours m’a paru plus court que les autres. J'ai profité de ces retrouvailles express pour prendre des nouvelles de certains et donner des nouvelles d'autres.

Après presque un an dans cette petite ville, voici la première observation que je pourrais en tirer : ici les gens sont plus sensibilisés au handicap. Si je résume la chose, l'Institut à fait comme une bombe dans la ville, je parle des commerçants, des prestataires de services de Chinon. Je m'explique, à l'Institut ils nous poussent pas mal à sortir, que ce soit pour faire les courses seul ou accompagné d'une A.S. ou pour d’autre raisons. J'ai remarqué que dans le Carrefour City les clients de l'Institut sont connus, et c'est la même chose à la Poste il est vrai que nous ne passons pas discrètement dans les rayons avec nos quatre roues. Mais cela fait plaisir de voir que les gens peuvent encore avoir un côté humain.

Aro R., Chinon, le 15 juin 2011